L'arnaque du mariage gay de Sarkozy et de Libération

Publié le par Gérard

Gilles BON-MAURY | Président d'HES (Homosexualités et Socialisme)
 

La une de Libération du 13 janvier 2012

Ce vendredi matin, Libération a choisi une couverture choc pour vendre ses 120 000 exemplaires quotidiens.

Un petit Sarkozy penaud passant la bague à l'énorme index d'un gay barbu, vêtu d'un slip blanc et d'une casquette de cuir (ci-contre).

Goguenard, le directeur de la rédaction du journal rappelait jeudi que le couple s'était déjà rencontré le 25 juin 2011. 150 numéros de Libération plus tôt.


Une de Libération du 15 mai 2011

 

Sommet de la subversion dérisoire ou de la dérision subversive, le couple devient donc le running gag du quotidien.

Il ne faut pas prendre les passants qui traversent les maisons de la presse pour des abrutis.

Ils comprennent très bien le second degré et se mobiliseront tous en faveur de l'ouverture du mariage à tous les couples.

 

Les lecteurs de Libération piégés

Cette image pourrait donner aux moins drôles l'envie facile de refermer le journal. Seulement voilà, elle est placardée en couverture. Il leur faudra donc ouvrir Libération pour y échapper. Et c'est à ce moment là qu'ils se sentiront dans le même état que le Sarkozy croqué en couverture : piégés.

 

Que dit la couverture ?

 

Mariage gay : Sarkozy tenté par le oui. Selon nos informations, le Président s'apprêterait à inscrire le mariage homosexuel dans son programme de campagne. »

Passons sur le vocabulaire. Parler de « mariage gay » ou de « mariage homosexuel » revient à reconnaître une sexualité à une institution, ce qui n'est pas raisonnable. Ou à distinguer entre mariage gay et mariage triste, ce qui n'est pas charitable.

 

Convenons que le lecteur distrait retiendra de cette couverture que Nicolas Sarkozy envisage de proposer l'ouverture du mariage aux couples homosexuels dans son programme – il est donc candidat – pour l'élection présidentielle de 2012.

 

Juste une « union civile » pour les homosexuels

Or, que découvre-t-on, lorsqu'on tourne la page du quotidien ?

« Nicolas Sarkozy, qui est en train de définir son programme de campagne, devrait y inclure “l'union civile” pour les homosexuels : le mariage gay fait son chemin à l'Elysée. »

Allons bon. L'union civile, on connaît. C'est le contraire de l'ouverture du mariage.

Le 3 septembre 2006, sur le plateau du 20 heures de TF1, le candidat Sarkozy a répondu à Claire Chazal :

« Je considère que le mariage homosexuel conduirait à l'adoption pour les couples homosexuels et je n'y suis pas favorable. Pour autant, je veux qu'on lutte contre toute forme de discrimination. Et l'amour homosexuel a le droit à la reconnaissance.

 

Donc je propose la création d'un contrat d'union civique qui garantirait l'égalité des droits successoraux, sociaux et fiscaux. Il n'y a aucune raison qu'un couple homosexuel soit désavantagé par rapport à un couple hétérosexuel. Et je suis même prêt à faire un pas de plus dans la reconnaissance de l'amour homosexuel sur l'organisation de cérémonies spécifiques et éventuellement, dans les mairies. »

C'est donc pour refuser l'ouverture du mariage à tous les couples qu'en 2006 déjà, le candidat Sarkozy proposait cette « union civile », objet juridique non identifié, pacs amélioré, sous-mariage, d'abord réservé aux seuls homosexuels, puis finalement à tous les couples sans enfant.

 

Une arnaque de Nicolas Sarkozy

Il a répété sa promesse en avril 2007 à TÊTU. Chacun peut aujourd'hui dresser le bilan : jamais la mise en œuvre de cet engagement de campagne n'a été à l'ordre du jour.

Mais chacun peut aussi se souvenir de la réaction de certains médias à cette époque. Le directeur de la rédaction de TÊTU d'alors a conclu ainsi son dernier éditorial avant les élections :

« Pour ce qui nous concerne, quel que soit le vainqueur, les homosexuels pourront accéder soit à une union style pacs, soit au mariage. On peut donc dire qu'on a gagné. »

Las, nous sommes déjà en 2012 et il ne semble pas qu'on ait gagné. Depuis 2007, en revanche, la Norvège, la Suède, Mexico, le Portugal, l'Islande et l'Argentine ont rejoint le club des pays qui ouvrent le mariage à tous les couples.

 

En 2007, le candidat Sarkozy a donc parlé d'« union civile » pour entretenir l'ambiguïté sur son refus d'ouvrir le mariage à tous les couples. C'est une arnaque, comme l'écrit Nicolas Gougain.

Certains se sont laissés piéger. Pendant cinq ans, le président Sarkozy n'a pas bougé. Il a nommé Christine Boutin au gouvernement. Il a investi Christian Vanneste aux élections municipales. Ses députés ont rejeté massivement la proposition de loi socialiste visant à ouvrir le mariage aux couples de même sexe.

Pendant cinq ans, à la droite qui a refusé systématiquement toute avancée des droits des couples de même sexe, la gauche a répondu rassemblée et volontaire.

 

Fausse info, fausse question

Et en 2012, il suffit qu'une députée UMP recycle cette vieille proposition d'« union civile » dans une contribution au projet de l'UMP pour que Libération ose : « Mariage gay, Sarkozy tenté par le oui. »

Deux erreurs en une page : il ne s'agit pas du mariage et il ne s'agit pas d'une tentation puisque cette mesure est inscrite à son programme depuis cinq ans.

Immédiatement, sur le fondement de cette une erronée, Europe 1 titre : « Mariage gay : Sarkozy prêt à dire oui ?  » et France TV s'interroge : « Sarkozy va-t-il inclure le mariage gay dans son programme ? “.

En 2007, Nicolas Sarkozy a promis. Il n'a pas tenu parole. En 2012, il n'a pas eu besoin de promettre : Libération s'en est chargé.

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