Coluche un clown ennemi d'état ...

Publié le par Gérard

Le candidat Coluche, lors de l'élections présidentielle de 1981, se retire en avril.

Le candidat Coluche, lors de l'élections présidentielle de 1981, se retire en avril.Sipa

 

En 1988, François Mitterrand avait lâché un "oui" timide de jeune marié sur le plateau d'Antenne 2 pour annoncer qu'il se présentait à sa propre succession à l'Elysée. Valéry Giscard d'Estaing avait choisi, en 1974, de "regarder la France au fond des yeux" pour lancer sa campagne présidentielle et Nicolas Sarkozy avouait qu'il y pensait "pas seulement le matin en se rasant". De son côté, en 2002, Lionel Jospin s'était contenté d'un simple fax envoyé à l'Agence France-Presse pour officialiser sa candidature.

 

Depuis que le général de Gaulle a décidé, en 1962, que l'élection présidentielle se ferait au suffrage universel direct – "clair, simple et droit", disait-il –, ce rendez-vous électoral a toujours fait saliver les grands fauves politiques et reste le moment suprême de la vie politique française.

 

"C'est la rencontre d'un destin personnel avec celui de la France", résume l'ex-premier ministre Jean-Pierre Raffarin dans le documentaire La Folle Histoire des présidentielles, écrit par Frédérique Bredin, ancienne ministre socialiste de Lionel Jospin, Jean-Jérôme Bertolus, journaliste à iTélé, et Michel Royer, l'un des meilleurs spécialistes des archives télévisuelles.

 

50 ANS DE MARATHON ÉLECTORAL

A travers de nombreux entretiens avec les principaux acteurs de ces campagnes et des images d'archives qui, parfois, font sourire, les trois auteurs, qui ont travaillé deux années sur le sujet, nous entraînent dans les coulisses de ces cinquante ans de marathon électoral hors du commun et tentent d'expliquer ce qui anime les candidats dans leur conquête du pouvoir.

 

Pourtant, l'histoire qu'ils nous racontent n'est pas un conte de fées. De la première élection, en 1965,où le général de Gaulle fut mis en ballottage par François Mitterrand, en passant par le duel fratricide entre Jacques Chirac, "véritable animal politique", et Edouard Balladur en 1995, à celle de 2007, où Ségolène Royal dut affronter son propre camp en plus de Nicolas Sarkozy, la présidentielle n'est faite que de coups bas, haines recuites, trahisons, chausse-trappes, liaisons dangereuses, fatigues et sacrifices personnels. "Ce n'est pas une élection pour poids léger", assure François Bayrou. "Une petite faiblesse devient un événement et chaque geste est significatif", souligne Jean-Pierre Raffarin, en rappelant la gifle donnée en 2002 par Bayrou à un gamin lui faisant les poches ou la petite phrase de Lionel Jospin, en 2002, sur Jacques Chirac "usé et fatigué".

 

"Il faut être fou pour vouloir être président", dit Jacques Delors, qui a renoncé à l'élection présidentielle de 1995 alors qu'il était au sommet des sondages. Interrogé par les auteurs, Michel Rocard, ex-premier ministre de François Mitterrand qui a été contraint par ce dernier d'abandonner ses ambitions présidentielles, "regrette" cette décision en ajoutant, quelque peu irrité: "Il aurait pu me passer le témoin, j'étais là!"


Effet de la télé-réalité ou confiance envers leurs interlocuteurs? L'ensemble des intervenants parlent sans langue de bois. "Il est évident que mon parcours politique a facilité les contacts et a permis à nos interlocuteurs de parler plus librementet en toute confiance", dit Frédérique Bredin. "J'ai été agréablement surprise par leur liberté de ton et leur franchise".

 

C'est une des grandes forces de ce documentaire qui, tout en étant pédagogique et parfois ludique, collectionne plusieurs scoops. Ainsi, pour la première fois, Lionel Jospin revient sur son échec à la présidentielle de 2002 et "le choc du 21avril" où il n'a pas pu accéder au second tour en arrivant derrière Jean-Marie Le Pen, président du Front national. "Je me suis trop laissé guider par le sentiment du devoir", explique-t-il. "J'étais le candidat obligé du PS et, dans les conditions stupides de division dans lesquelles nous allions à cette élection, j'aurais dû dire sur cette base-là que je ne suis pas candidat. C'est ça mon regret." Terrible aveu corroboré par ses proches comme Claude Estier,expliquant que Lionel Jospin "n'avait pas envie d'être président et voulait simplement la peau de Chirac". Estier raconte d'ailleurs que Jospin lui avait dit avant le premier tour qu'il avait "déjà eu tout ce qu'il pouvait espérer dans la vie".

 

Ce n'est pas le cas de Nicolas Sarkozy qui, lui, en rêvait "depuis son plus jeune âge", comme le confie son frère Guillaume. La raison? Sa taille! "Il ne pouvait pas se démarquer par la taille, alors il l'a fait par le pouvoir", poursuit-il. Une analyse confirmée par Pal, le père: "S'il avait trente centimètres de plus, il ne serait pas président de la République."


Entre souvenirs, anecdotes et relectures de l'Histoire, les témoins révèlent la face cachée de leurs favoris. Jean-Marie Le Pen commet même un lapsus révélateur en racontant qu'après avoir connu des salles vides à ses débuts, il avait, par la suite, rempli "le Vel' d'Hiv… euh… le Vélodrome de Marseille".

 

Toujours mal à l'aise face à la caméra mais plus réaliste sur sa mauvaise campagne de 1995, Edouard Balladur reconnaît ses erreurs de communication et son attitude distante avec les gens. Les images d'archives sont accablantes. Claude Goasguen, député UMP de Paris, qui a participé à sa campagne, reconnaît que "la forme était imparfaite" et avoue quelques "coups montés" médiatiques pour remonter la pente du favori des sondages de l'époque. Rattrapé aujourd'hui par la justice pour ses comptes de campagne à travers l'affaire de Karachi, Edouard Balladur ne lâche pas un mot. Mais Roland Dumas, ex-président du Conseil constitutionnel, qui a validé les comptes contestés, explique, plutôt embarrassé, que "la France avait besoin d'un président, même au prix de quelques anomalies"

 

Et 2012? Tous prédisent que la campagne sera "très dure et très méchante". "C'est la meilleure hypothèse", note François Hollande, le candidat "normal" des socialistes qui s'attend à une campagne "sans gants beurre frais et les compliments de l'adversaire". "Ce sera la campagne des grands courants d'air", promet l'ex-premier ministre Dominique de Villepin, que Nicolas Sarkozy avait promis de pendre à un croc de boucher. Paroles d'expert.

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