Retraites et pénibilité: "Le dispositif du gouvernement est complètement injuste"

Publié le par Gérard

 

Sur Le Post, le Syndicat national des professionnels de la santé au travail estime que les études sur les risques liés au travail n'ont pas été prises en compte.

Pénibilité du travail, retraite anticipée, ouvrier, usine
Pénibilité du travail, retraite anticipée, ouvrier, usine
Max PPP

On connaît désormais le projet de réforme du gouvernement sur les retraites. Sur la question de la pénibilité au travail, les départs à la retraite seront jugés au cas par cas selon le principe suivant: maintien de la retraite à 60 ans à taux plein pour les travailleurs dont une incapacité physique d'au moins 20 % aura été actée par une visite médicale.

Pour le ministre du Travail Eric Woerth, ce dispositif
constitue une "avancée sociale majeure", rapporte France Soir. Les médecins du travail, eux, sont nettement plus dubitatifs...

Contactée par Le Post, Mireille Chevalier, secrétaire générale du Syndicat national des professionnels de la santé au travail, explique que "le dispositif du gouvernement est complètement injuste car seule la pénibilité physique visible dans l'immédiat est prise en compte".

Que représente une incapacité physique de travail de 20 %?
"C'est une incapacité très lourde. Par exemple, une épaule vraiment abîmée, dont le travailleur ne peut plus se servir, atteint environ les 10 % d'incapacité. A ce stade là, on est déjà reconnu comme travailleur handicapé, et pourtant ce ne sera pas suffisant pour bénéficier de la retraite anticipée. 20 %, c'est vraiment énorme."

Pourquoi doit-on attendre que le travailleur aille très mal physiquement pour lui accorder une retraite anticipée?
"C'est effectivement le problème. Nous jugeons que le dispositif du gouverneemnt est complètement injuste car seule la pénibilité physique visible dans l'immédiat est prise en compte. De plus, il faut que les altérations de l'état de santé entrent dans le tableau des maladies professionnelles, ce qui n'est pas le cas de nombreuses pathologies. Par exemple, tout ce qui concerne la santé mentale, comme les graves dépressions liées au travail, n'y figure pas.
Le fait d'attendre que le travailleur soit gravement en incapacité de travailler est d'autant plus aberrant qu'on sait très bien que certains métiers ou certains postes sont exposés à des risques de cancers ou de maladies chroniques. Or avant un cancer, on est en bonne santé. Evidemment, il y a un argument statistique dont s'est emparé le gouvernement: tous les travailleurs de ces secteurs ne mourront pas prématurément, donc il ne veut pas payer une retraite anticipée à tous. Et tant pis pour celui qui aura un cancer..."

Etait-il impossible d'établir une liste des métiers pénibles?
"C'est difficile mais pas impossible à faire. Cela nécessite de se mettre d'accord sur les critères: les risques de cancers? la fatigue? l'usure physique? Ce qui est certain, c'est que des études épidémiologiques existent. On sait par exemple qu'un ouvrier vit moins longtemps qu'un cadre. On sait aussi que tel ou tel poste expose davantage aux risques de cancer. Mais j'ai l'impression que le gouvernement a balayé tout cela d'un revers de la main. Nous sommes amers car toutes nos études, tout le travail réalisé ces dernières années, n'ont pas été prises en compte."

Peut-on s'attendre à ce que les gens terminent leur vie en plus mauvaise santé qu'avant?
"C'est possible. Ce n'est que de la prospective mais on peut effectivement le craindre. Les travaux pénibles et les conditions de travail inconfortables, comme le travail de nuit ou le
3*8, sont de plus en plus difficiles à supporter avec l'âge. Si on maintient ces travailleurs deux ou trois années supplémentaires à leurs postes, on peut craindre que ces personnes vivent moins longtemps."


Il y a deux semaines, une longue enquête d'Arrêt sur images expliquait que c'était probablement grâce à la retraite à 60 ans que nous vivons aussi vieux. A lire
ici.



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