«Planète à vendre» ou comment la terre est devenue une marchandise comme une autre

Publié le par Gérard

La plantation de roses d'Oromia, en Ethiopie, produit 24 millions de roses par an pour le marché européen, japonais et du Moyen-Orient.

DOCUMENTAIRE - La délocalisation de l'agriculture dénoncée dans ce film, mardi soir sur Arte...

En ce début de XXIe siècle, une 3e vague de délocalisation a vu le jour: après l'industrie et les services c'est au tour de l'agriculture, qui garantit des retours sur investissements fort lucratifs aux riches acquéreurs de terres dans les pays pauvres. Planète à vendre, c'est l'histoire «d'un western moderne», selon Alexis Marant, le réalisateur de ce documentaire coproduit par Arte et Capa. Il raconte, à travers des exemples précis en Ethiopie et en Amérique latine, comment la terre est devenue une «marchandise comme une autre». Pour nourrir les 9,2 milliards d'habitants prévus en 2050 il va falloir doubler la production agricole. Une aubaine pour les investisseurs qui ont fait bondir de 5 à 175 milliards de dollars les capitaux spéculatifs investis dans les matières premières agricoles entre 2000 et 2007.
Les petits producteurs n'ont plus l'accès à l'eau ni aux pâturages
Premier exemple détaillé dans le documentaire, l'étonnante ascension de l'industriel indien Ram Karuturi, parti en Ethiopie pour se hisser pratiquement au premier rang des producteurs mondiaux de roses, vendues surtout en Europe. Héritage d'un régime communiste, toutes les terres appartiennent à l'Etat éthiopien, un des pays les plus pauvres de la planète, dont 13 millions d'habitants ont bénéficié en 2009 de l'aide du Programme alimentaire mondial. Le gouvernement, adepte de l'économie libérale, a décidé de mettre 3 millions d'hectares à la disposition des investisseurs étrangers.
Pour la population paysanne locale, cela signifie l'exil ou alors des conditions de travail et de salaire dictées par les nouveaux propriétaires. «Rien dans notre contrat ne nous impose de créer des emplois ou de construire des écoles et hôpitaux», souligne Ram Karuturi, «mais on le fait quand même». Il emploie 6.500 personnes dans ses serres pour produire 1,5 million de roses par jour et vient d'acquérir 300.000 hectares supplémentaires pour y faire du maïs, de l'huile de palme et du riz. «On peut y produire 3 millions de tonnes de riz, 10% du marché mondial», selon lui. Sur ses nouvelles terres, les petits producteurs et éleveurs n'ont plus l'accès à l'eau ni aux pâturages pour les bêtes. L'administration a bien mis en place un service de «réclamation», mais aucune plainte n'a été déposée.
Des investissements qui permettent «de doubler la valeur des actifs en 5 ans»
En Argentine, le Français Olivier Combastet promet à ses investisseurs «de doubler la valeur de leurs actifs en 5 ans». Les surfaces agricoles achetées assureront un très haut rendement grâce «à la technologie», autrement dit les semences transgéniques de soja qui résistent à la sécheresse, entre autres. En Uruguay, le soja est ainsi devenu la principale culture passant de 10.000 ha en 2001 à 600.000 ha, au grand dam de la biodiversité, selon les défenseurs de l'environnement. Les petits producteurs locaux déchus sont, eux, repoussés à la périphérie des villes. Le documentaire, diffusé par Arte mardi à 20h40, sera suivi d'un débat.
© 2011 AFP
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